En direct du Salon de la Vachitude

Mes Chers Compatriotes,

Alors c'est ça ! Il suffit que j'aille au Salon de l'Agriculture pour que les candidats se ruent à ma suite ! C'est curieux, ça ne se bousculait pas autant pour marcher dans la bouse les années sans élection.

Par contre, je suggère au grand Villepin de se limiter au Salon du Livre, son brushing, ses costards Armani et ses mimines d'aristocrate font désordre au royaume de la croupe de ruminant. Les bêtes le sentent, d'ailleurs, que le cœur n'y est pas, non plus que la pratique. La louche au valseur bovin ça ne s'improvise pas. C'est un art et c'est beaucoup de travail pour perfectionner un don naturel. La main doit être puissante et musclée, une bonne livre la pièce. La tonicité et la posture manuelles doivent être fermes mais pas crispées. La main est décontractée, mais cependant pesante, que le bestiau comprenne immédiatement qui est le patron, sans se sentir agressé. Ça ne doit pas claquer comme une gifle, ni rester silencieux : un son entre "plof" et "ploc" (plouc pour les vaches bretonnes). Sans ça, la bête peut se venger en vous allongeant un grand coup de queue en pleine terrine et ça va déranger votre mise en plis. C'est justement la raison pour laquelle Thierry Breton est coiffé comme un attentat dans une fabrique de chipolatas : une visite de trop au Salon de l'Agriculture. Ça faisait quelques années qu'il venait, mais il restait un peu en retrait, timide, petit garçon bien sage. Et puis, il s'est enhardi, c'est humain, c'est comme ça que l'Humanité progresse (non pas le journal, à la campagne, ils leur fileraient plutôt des coups de fourche aux "partageux"). Malheureusement, il a mal choisi sa bête : Gertrude, une Simmental de 750 kg. Il aurait dû commencer petit : une Jersey, par exemple, c'est tout mignon, tout doux, fin et gracieux, une vraie vache de jeune fille. Mais là, Grosses-Miches (c'est le surnom de Gertrude) lui a tiré un aller-retour dans les yeux qui lui a fait entendre le Bourdon de Notre-Dame façon "Paris brûle-t'il ?". Pendant deux jours, il criait à tout bout de champ "les Américains arrivent". On n'a jamais pu le recoiffer depuis et il est resté un peu cloche. C'est pour ça qu'il se prend pour un battant.

Mais revenons à nos candidats. François Bayrou, rien à dire : fils de paysan, ex-paysan lui-même, ça sait traire, conduire un tracteur, ça sent fort le Béarn, un pro. Le Vicomte vendéen est également passé voir ses serfs, bénir les derniers nés et déflorer les jeunes mariées, comme ses droits ancestraux l'y autorisent. Noeunoeil-de-Saint-Cloud a rencontré ses semblables dans un groin coin discret. Bref, la première fournée de politiques a été sans encombre. Je crains nonobstant le pire pour les autres… Regardez ce que les vaches en pensent.

Dernière minute : Au Salon, François Bayrou a été présenté à Cécilia, une vache primée (chez Gala et Voici, ils sont au bord du suicide, ils avaient cru au scoop de l'année).

Bien à vous,

Jacques

P.S. : Demain "Des oreilles ennemies vous écoutent".